PETITE HISTOIRE N°25

 
Crédit photo : André Luu

Crédit photo : André Luu

 
 

Aïli se posa sans difficulté sur la fleur de nénuphar qui ondula légèrement puis se stabilisa.
Elle choisit un pétale et s’y allongea. Les ailes déployées et les bras en croix, elle reprenait son souffle.
Cette fois encore, Niwan ne l’avait pas rattrapée, il ne la rejoint que quelques secondes plus tard, les pommettes couleur sapin et les cheveux châtains en bataille.
Il s’assit auprès d’elle et la dévisagea de ses grands yeux verts en amande. Puis il se laissa tomber sur le dos.

— Tu gagneras toujours, haleta-t-il, tu m’énerves, tu sais ?

Aïli répondit d’un grand éclat de rire et se tourna vers lui. Elle replia son coude et appuya sa tête dans le creux de sa main.

— Tu boudes ? demanda-t-elle en lui pinçant doucement le nez entre son pouce et son index.

Le soleil traversait la fine membrane tendue entre ses quatre doigts, révélant les minuscules cristaux précieux qui recouvraient sa peau d’un vert opalescent.
Une boucle de ses cheveux roux tomba sur son œil, elle lâcha le nez de Niwan, ébouriffa la tignasse de son frère puis se rallongea.

— Ils ne nous ont pas vus partir, dit-elle.

— J’espère… Mais le banquet avec les ambassadeurs commence dans une heure et nous avons juste le temps de rentrer pour nous préparer.

— Ouais. Ne provoquons pas la colère de Père.

Ensemble, ils se redressèrent. Les deux opercules de leur carapace dorsale se soulevèrent et leurs ailes s’y blottirent.

— Prête ? demanda-t-il.

Ils plongèrent en même temps mais Aïli savait qu’il parviendrait au palais niché au fond du lac avant elle.
Naïwan était incontestablement le plus rapide à la nage.

Le filet du chasseur de cristaux les manqua de peu. Il s’abattit sur le nénuphar une demi-seconde après que les deux zimius aient plongé, détruisant la magnifique fleur qui coula lentement. L’oiseau repêcha le piège de son bec et le rapporta à son maître qui l’attendait sur sa barque. Il le lâcha près de lui avant de se poser sur la proue. Se saisissant fébrilement du filet, Ling inspecta les mailles sans rien y trouver. Rageur, il jeta l’objet vers l’oiseau qui l’évita d’un bond en poussant un cri moqueur.

Mécontent de sa chasse, Ling regarda dans le seau. Uniquement deux zimius aujourd’hui.

Ils trempaient dans la solution d’acide et seule une toute petite pellicule de cristaux précieux surnageait.